Pour le député européen du Rassemblement national Jean-Lin Lacapelle, la France paye aujourd’hui l’abandon de ses entreprises stratégiques, rachetées depuis quelques années par leurs concurrents étrangers. Une absence de vision qui met à mal la souveraineté de notre pays.
Les délocalisations, les rachats d’entreprises de pointe par des firmes étrangères et, maintenant, la crise du COVID ont montré aux Français la fragilisation de notre souveraineté industrielle. La France a perdu le potentiel industriel qu’elle avait dans les années 70-80. La rupture d’approvisionnement en masques nous l’a démontré. Pour autant, elle demeure une puissance industrielle en termes d’armement lourd ou de haute technologie.
Une tendance de fond est observée depuis les années 2000. De la vente d’Alstom énergie au rachat de Latécoère, en passant par celui de Photonis : longtemps préservée, notre industrie de défense est aujourd’hui bradée au plus offrant. Dans le secteur de l’armement léger, la plupart des équipements du soldat sont fabriqués à l’étranger. Terminé les fusils Famas et FR-F2, les uniformes Paul Boyé ou les rangers « made in France ». Désormais, l’équipement est allemand, belge ou autrichien, sans parler de la destruction de notre industrie de munitions, qui rend l’armée française tributaire des approvisionnements étrangers. Même constat pour le numérique militaire. Nous utilisons des logiciels étrangers dont nous savons qu’ils transmettent des informations confidentielles vers leurs patries de développement. Le logiciel américain Palantir, utilisé par la DGSI, ou les drones Reaper, utilisés par l’armée française, en sont les exemples les plus flagrants.
C’est avant tout l’angélisme libéral d’une concurrence mondiale libre et non faussée qui a entraîné notre pays dans cette ornière
Comment avons-nous pu passer d’un arsenal presque 100% français à cette situation ? Tout simplement par absence de stratégie. Alors que nous aurions dû soutenir nos entreprises en les privilégiant dans les appels d’offres, en les accompagnant dans leur R&D, et en les protégeant de la prédation, nous les avons laissées à la merci de la concurrence internationale.
C’est avant tout l’angélisme libéral d’une concurrence mondiale libre et non faussée qui a entraîné notre pays dans cette ornière, couplé à une absence de vision condamnant des pans entiers de notre industrie de défense.
Pour autant rien n’est intangible ! Dès que sera élu un exécutif ayant la volonté de restaurer notre souveraineté et de protéger notre industrie ; il existera des mécanismes à instaurer immédiatement pour protéger l’industrie de défense française :
- Lancer un audit général des ventes, cessions, rachats… d’entreprises stratégiques, et activer en leur faveur les dispositifs légaux permettant l’intervention de l’État ;
- Moderniser et renforcer la DGA et son agence d’innovation Innovation Défense Lab sur le modèle de la DARPA et de la Defense Innovation Unit américaines dont les buts sont la capture de l’innovation, le partenariat avec les entreprises dans la R&D, et l’exploration de la dualité technologique des inventions civiles ;
- Dégager, dans les projets de lois de finances et celles de programmation militaire, les financements publics nécessaires à ces organismes et à la bonne conduite de leurs activités ;
- Réviser le « décret Montebourg » (relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable) et en élargir le périmètre sur le modèle américain du FIRRMA et du CFIUS. De nombreuses innovations utiles dans le monde de la défense sont issues de technologies civiles. Perdre des entreprises comme Aldebaran, spécialisée dans la fabrication d’androïdes d’assistance à la personne, c’est perdre à terme des innovations dans le domaine de la robotique militaire.
Je le répète : le dispositif qui nous permettra de relancer notre industrie existe déjà, et ce n’est que par inaction coupable qu’il n’est pas utilisé. Le réactiver, l’étendre, le compléter, voilà les trois clés grâce auxquelles un gouvernement vraiment soucieux des intérêts de la France lui donnera les moyens de se réaffirmer. En 1525, l’Empire de Chine a sabordé sa flotte, renonçant à la suprématie navale qui aboutit, en 1839-1860, à sa soumission par l’Europe. Elle en a tiré les leçons. Ce n’est pas en 2020 qu’il nous faut imiter son erreur d’il y a cinq siècles.